Genre : Fantasy - Littérature adolescente Citation : « Elle perçut un bref sursaut d'émotion de la part du dieu moribond, suivi d'un infime frémissement dans l'air. » Présentation du livre : Dans une autre vie, elle s’appelait Adrienne Satti, mais à présent, elle n’est plus que Widdershins. Gamine des rues, devenue noble, puis voleuse – la vie ne l’a pas épargnée. Orpheline très jeune, elle a connu la pauvreté et le luxe les plus extrêmes. Revenue aux ruelles sombres d’où elle était sortie, elle est désormais considérée comme l’une des voleuses les plus intrépides... Mais ses talents suffiront-ils à la sauver de la ténébreuse conspiration qui ronge inexorablement les entrailles de la cité de Davillon ? Widdershins, l’aristocrate devenue voleuse, connaît mille façons de couper une bourse et autant de charmer ducs et barons dans les salons de la noblesse ! |
♦ Critique par Bleuenn G.
Je remercie les éditions Lumen et Histoires de Romans pour m'avoir fait découvrir ce livre, dont la couverture comme le résumé m'ont immédiatement interpellée.
L'écriture d'Ari Marmell est plutôt sobre mais ne tombe pas dans le simpliste, même si la plupart des structures de phrases restent basiques. Cependant le vocabulaire, riche et complexe, rend la lecture agréable. Si la dynamique est bonne, le rythme laisse davantage à désirer. Certains passages sont en effet un peu longs, et le lecteur attend davantage d'action alors que des scènes s'éternisent. Ainsi, l'auteur n'appuie pas toujours les passages les plus intéressants. Mais la lecture est très fluide, et Widdershins est un roman qui se lit rapidement et dans lequel le lecteur se plonge facilement. Tous les dialogues ne sont pas utiles, cependant, ils sont pour la grande majorité vivants et crédibles, et donnent de la vie aux personnages. Toutefois, un point noir : les différences de langages entre les personnages ne sont pas suffisamment marquées si bien qu'un aristocrate parle de la même manière qu'un voleur, ce qui est dommage. L'auteur utilise des flash-back pour raconter le passé de l'héroïne et si l'idée est bonne et judicieuse, elle n'est pas très bien utilisée. En effet, il faut plusieurs chapitres au lecteur perdu pour remettre en ordre toutes les scènes et les événements et comprendre enfin une partie de ce qu'il se passe.
L'intrigue présentée n'est guère originale : l'héroïne est poursuivie par des méchants, qui complotent pour s'emparer ou détruire sa cité. Les aventures de Widdershins sont donc malheureusement assez prévisibles. La fin est plutôt déroutante, mais dans le mauvais sens du terme. En effet, je n'ai absolument pas été convaincue par le "méchant". De même, si ses raisons d'agir sont originales et auraient pu être très captivantes, elles sont présentées de manière caricaturales - donc ridicules - et manquent de développement. Le monde construit par Ari Marmell est accrocheur et donne envie d'en savoir plus : si le décor ressemble à l'époque médiévale, l'auteur a introduit une religion intéressante, polythéiste et basée sur un Pacte, avec plus d'une centaine de dieux reconnus. Malheureusement, en utilisant des mots comme «évêque», qui renvoient trop à la religion catholique, l'immersion n'est pas totale. De plus, davantage d'approfondissement aurait été bienvenu, en espérant donc que le tome 2 nous en apprenne plus sur cette religion. Widdershins, l'héroïne, a un passé fascinant : orpheline et pauvre, elle devient voleuse enfant. Puis recueillie par un noble, elle fait son entrée dans l'aristocratie, avant de redevenir voleuse. Les passages d'un milieu à l'autre sont bien expliqués et crédibles, même si j'aurais aimé avoir plus de détails sur ses vies précédentes, notamment lorsqu'elle appartenait à l'aristocratie. Widdershins a un caractère bien trempé, têtue et aventureuse elle se jette dans les ennuis. Si ses failles auraient pu être davantage exploitées, contrairement à de nombreux romans où les personnages principaux réussissent tout sans explication, l'auteur ici en présente une : si Widdershins n'a que peu de faiblesses, c'est pour la simple et bonne raison qu'un dieu est avec elle. Au sens propre du terme. Elle se balade donc avec un dieu dans la tête, ce qui s'avère extrêmement pratique, notamment dans les combats contre ses ennemis. Insolite, cette idée est intrigante et attrayante. Widdershins est bien construite et le lecteur peut donc aisément s'attacher à elle. Quant aux personnages secondaires, aucun ne se révèle suffisamment complexe ou travaillé pour marquer le lecteur. En effet, beaucoup se ressemblent, et il faut un temps considérable pour repérer qui est qui. De plus, ils manquent de relief et semblent être constamment éclipsés face à l'omniprésence de Widdershins. Cet effet est peut-être également dû au nombre trop important de personnages secondaires, qu'on ne voit que quelques pages et qui semblent importants alors qu'ils disparaissent par la suite. L'atmosphère médiévale est toutefois bien retranscrite, et les descriptions, sans être lourdes, parviennent bien à faire imaginer les lieux au lecteur.
Ce roman plaira certainement aux jeunes lecteurs aimant les héroïnes fortes, qui se battent pour leur survie ou contre des ennemis. Si l'univers est extrêmement alléchant, tout comme le passé de Widdershins, et qu'Ari Marmell fourmille d'idées très intéressantes, elles ne sont malheureusement pas suffisamment exploitées et approfondies pour rendre ce premier tome inoubliable. A suivre...