Genre : Roman de vie contemporain Lectorat : Adulte Citation : « C'est fini. Dans la nuit grise de Flushing Meadows, sur un dernier passing de revers coupé qu'il ne peut pas toucher, John vient de perdre son quart de finale contre Ivan Lendl. » Présentation de l’histoire : Juin 1984, finale de Roland-Garros. Quand le petit Julien, devant le poste de télévision, affiche sa préférence pour Lendl, sa mère lui révèle qu’il est le fils de son adversaire, John McEnroe. Il a cinq ans et grandit dans l’ombre de cette paternité mythique, au rythme des victoires des héros du tennis qu’il rêve de supplanter un jour. Mais à l’évidence, il n’a pas hérité des gènes du champion, et s’enlise aux barbecues-parties du club de tennis de Besançon. |
♦ Critique par Bleuenn G.
Je remercie les éditions JC Lattès et Histoires de Romans pour m'avoir fait découvrir ce livre, moi qui suis passionnée de tennis.
Le style d'écriture d'Arnaud Friedmann est particulier, à la fois oral et recherché, et permet de plonger très rapidement dans l'histoire, tout comme le vocabulaire employé, parfois cru, mais jamais vulgaire. Agréable et fluide, ce roman se lit en quelques heures à peine, même si les descriptions de matchs de tennis sont précises et peuvent rebuter les novices qui connaissent peu ce sport - et, au contraire, plaire énormément aux passionnés. L'auteur utilise le présent, ce qui colle parfaitement à son style d'écriture. La narration à la troisième personne alterne deux points de vue, celui d'Hélène, la mère, et celui de Julien, le fils. L'auteur réussit avec brio à démarquer ses deux personnages qui ne réfléchissent pas du tout de la même manière et se distinguent donc aisément. De même, sans prévenir son lecteur, Arnaud Friedmann joue avec des flash-back pour raconter le passé d'Hélène et notamment sa rencontre avec John McEnroe, et il le fait très bien car c'est sans difficulté que le lecteur s'en rend compte. Le lecteur n'est jamais perdu, malgré l'alternance de temps et des points de vue. Le rythme, comme la dynamique, sont excellents et permettent de visualiser parfaitement les scènes comme les personnages. Arnaud Friedmann alterne les longues phrases parsemées de virgules et des phrases nominales courtes, incisives. Les dialogues sont bien placés, peu nombreux, et l'auteur utilise plus volontiers le style indirect qui s'accorde beaucoup mieux à la narration et à la personnalité des personnages. Ils peuvent parfois paraître futiles, voire inutiles, mais donnent du relief aux personnages.
Le tennis est un sport romantique raconte l'histoire d'une mère et son fils au fils des années, rythmées par les tournois de tennis. Cependant, si le tennis est très présent, que l'auteur s'attarde sur des descriptions de matchs et que la vie même des deux personnages tourne autour de ce sport, ce roman va bien plus loin. En effet, le lecteur suit l'évolution d'Hélène, jeune mère dépressive, obsédée par McEnroe et qui délaisse son fils, Julien, qui se met au tennis dans l'espoir de devenir aussi doué que son père supposé, et que l'on voit grandir au fil des pages. Ainsi l'histoire commence alors qu'il a à peine cinq ans, le soir où sa mère lui annonce qu'il est le fils de McEnroe, et s'arrête lorsqu'il en a vingt-huit. On le voit donc évoluer, se construire avec cette paternité fantasmée à travers son enfance, puis son adolescence. Le thème de la paternité est évidemment omniprésent tout au long du roman, au point que McEnroe pourrait être considéré comme le troisième personnage principal, alors qu'il n'apparaît réellement que très brièvement. D'autres sujets sont abordés, comme la naissance de la sexualité chez un jeune ou la sexualité d'une mère célibataire, la dépression et les liens, parfois fragiles, entre une mère et son fils. Les personnages sont très bien réussis, même si les personnages secondaires restent en retrait et ne parviennent pas vraiment à se faire une place face à Hélène et Julien. En réalité, ils servent davantage à mettre le duo en relief. Toutefois, ils sont tous crédibles et font vrai. Hélène et Julien sont particulièrement complexes et attachants, avec leurs failles et leurs défauts. Il n'y a pas d'intrigues à proprement parler, puisque l'on suit la vie de cette mère et son fils, toutefois, une question reste omniprésente dans l'esprit du lecteur : McEnroe est-il réellement le père de Julien ? L'histoire de la mère est cohérente et crédible, même s'il paraît fou que ce soit vrai. Au lecteur de se faire son idée. Il n'y a que peu de descriptions, et presque toute dévouées au tennis, toutefois cela ne gêne pas pour s'imaginer les scènes ou personnages. L'ambiance est parfois sinistre voire met le lecteur mal à l'aise, notamment à travers un vocabulaire cru, mais cela sert l'histoire.
Pour conclure, j'ai beaucoup aimé ce livre, basé sur les relations compliquées entre une mère et son fils, dans l'ombre d'une paternité fantasmée et dans l'univers sportif du tennis. Je le déconseille toutefois à ceux qui n'aiment pas le tennis, car certains termes sont techniques et certaines descriptions, longues pour les novices.