ÉLÉPHANTS
Michel Pommier
Michel Pommier
Genre : Science-Fiction - Expérimental Citation : « Le vrai créateur est ailleurs, il est l’Inconnu » Présentation de l’histoire : Dans la Préhistoire, dans les temps passés ou modernes, à travers des dimensions parallèles ou dans l’espace sidéral, Nuc, Linda et Keren, Arnaud et Maelle, Johanna, Simon et quelques autres personnages, fictifs ou réels, se cherchent dans un monde qu’ils tentent désespérément d’appréhender. L’auteur et son double, Robert, un écrivain peu scrupuleux détermine leur destin en dépit de l’intervention de X, un scientifique voyagent dans la conscience de l’univers. |
♦ Critique par Laura R.
Je tiens en premier lieu à remercier le collectif Histoires de Romans ainsi que Nats Éditions pour m’avoir permis de découvrir ce livre si particulier, qui s’éloigne beaucoup de ce que l’on a l’habitude de voir dans la Science-Fiction.
Je ne le cacherai pas, la lecture d’Éléphants m’a beaucoup dérouté autant dans son histoire que dans le style d’écriture de l’auteur qui joue sur une dynamique et un rythme volontairement saccadé. Il y a beaucoup d'espace, des changements de paragraphes fréquents, les phrases sont tantôt brèves, tantôt longues, et l’écriture est simple et sans ornement. Les dialogues quant à eux sont aussi particuliers, très fragmentaires, ils participent à la confusion et au mystère entourant l'intrigue. Un saut de ligne marque la prise de parole et si la ponctuation est respectée, on remarque l’absence volontaire de guillemets et de tirets. Cela surprend au premier abord - et il ne fait aucun doute que certains reposeront le livre à cause de ça -, mais se justifie à la lecture du roman. Concernant le vocabulaire employé, on passe d’un registre soutenu à un registre familier selon le narrateur et leurs utilisations restent cohérentes tout au long de l’œuvre. Enfin, comme je le soulevais pour les dialogues, la mise en page est très étonnante, mais s'accorde bien au roman. Il y a eu un véritable travail de recherche pour présenter Éléphants, bien que cela puisse plaire ou ne pas plaire.
Les particularités de l’écriture et de la mise en page se retrouvent également dans le récit. Ici, il n’y a pas une seule intrigue mais plusieurs, fragmentées. Il faudra sans doute plusieurs lectures pour parvenir à voir où l’auteur veut nous mener avec sa multitude d’histoires et de personnages, mais l’expérience s’avère intéressante. Le fait de changer de contexte et de protagoniste à chaque partie de ce roman rend l’intrigue originale mais aussi relativement complexe. Le risque étant que le lecteur ne se décourage au fil des pages, perdu dans des histoires dont on ne sait parfois pas le début ou la fin et qui, de fait, peuvent paraître décousues. Le format de ce livre, le nombre de petits récits dont il est constitué ne laisse pas beaucoup de place au développement des personnages, qui apparaissent de façon anecdotiques ou reviennent plus fréquemment. Cela peut éventuellement gêner les lecteurs qui aiment pouvoir s’identifier aux protagonistes, connaître leur vie et leurs pensées mais n’enlève rien à l'intérêt du roman. Michel Pommier peint ici une toile de l’humanité, en représentant différentes époques, religions, milieux et en mettant en scène des personnages dans des situations distinctes. Il est dommage néanmoins que l’auteur ne soit pas allé plus loin dans son idée, car cela nous laisse parfois l’impression que certains passages mériteraient d’être davantage développés. La lecture d’Éléphants demande une certaine implication dans la mesure où il est nécessaire de le reprendre plusieurs fois pour comprendre l’histoire et discerner le lien établi entre les parties. Fort heureusement, des correspondances sont placées à la fin ce qui éclaircit les choses sur l’intrigue et les choix éditoriaux.
Éléphants fait parti de ces romans expérimentaux qui prennent des risques osés pour toucher un lectorat. Ainsi - et compte tenu des différents points soulevés dans la critique -, je ne recommanderai pas ce livre à tous, mais suis persuadée que certains se laisseront séduire. Je salue le choix de l’éditrice qui a permis à ce roman, certes particulier, mais non pas dénué d’un grand intérêt, de voir le jour.