Genre : Heroïc Fantasy Lectorat : Adulte Citation : « Le brroumm brrrouoummm des moutons en marche roule sous son crâne comme le tonnerre, évoque des images, des sensations, qui effacent vite le difficile problème de l'amour. Brroummm... brrrouoummm... » Présentation de l’histoire : Tous les trois siècles, une étoile rouge apparaît dans le ciel de Galova, illuminant d'écarlate les nuits de la planète. C'est alors que se manifestent les chimères. Redoutées par les autochtones, conjurées par les prêtres et les mages, elles ne semblent pourtant pas effrayer Feïn, l'innocent berger. Serait-il "possédé" ? Au pays d'Enlall, Thazi, fille de pêcheurs, se découvre un étrange pouvoir, qu'elle va déchaîner bien malgré elle sur un seigneur local. Traqués tous deux par les utorités religieuses de leurs pays, Feïn et Thazi vont affronter une destinée plus mystérieuse encore... |
♣ Critique de Maud G.
J'ai entrepris la lecture de Chimère suite au partenariat avec les éditions Lokomodo. La couverture, sublime, est signée par la talentueuse Kristal Campruby et me faisait miroiter monts et merveilles avant même d'avoir tourné la première page... Un bel écrin pour un contenu qui n'en fut pas à la hauteur.
Pourtant, j'ai tout de suite repéré un certain talent dans l'écriture de l'auteur. La plume est habile, mature et se démarque par ses constructions de phrases hors du commun, très travaillées, mais également trop complexe qui perdra les lecteurs les moins aguerris en cours de route. Cependant, la dynamique et le rythme sont effroyablement figés, le récit souffrant d'un effet de lourdeur que le style n'aide pas. Mais le problème majeur tient surtout du découpage du texte et du passage d'un personnage à un autre qui est assez mal maîtrisé. En effet, le lecteur a commence à apprendre à connaître le héros qu'il suit, de visualiser l'environnement qui l'entoure, commence à s'imprégner de ce qui lui arrive que l'on passe au suivant sans plus de cérémonie, un peu comme si d'un coup on vous imposait de suivre une autre histoire... C'est terriblement frustrant et désagréable, si bien que le lecteur est obligé de suivre intégralement un nouveau sas pour pouvoir rentrer de nouveau dans le récit... Et cela jusqu'à la prochaine rupture, puis la suivante... Aussi, à cette étape, seule une première vague de lecteurs déterminés n'aura pas abandonnée la lecture. La narration omnisciente est un choix très pertinent et permet d'avoir une grande vision d'ensemble, peut importe le protagoniste que l'on suit, mais le temps utilisé, à savoir le présent de l'indicatif, n'est pas du tout adapté, mais le lecteur n'a d'autre choix que de s'y accommoder... Personnellement, j'ai été obligée de modifier mentalement chaque phrase au passé, un exercice fastidieux qui a cependant permis de leurrer un peu plus de dynamique. Le vocabulaire est riche, mais on se lasse vite des termes propres à l'univers dont on ne voit pas toujours la pertinence de précision ou l’intérêt de répétition... Enfin, les dialogues, peu nombreux, sont vraiment vivants et tombent toujours au bon moment pour bousculer l'action ou attiser le suspense.
Le roman est construit en quatre parties : les trois premières sur chacun des trois héros et le dernier rebondissant de l'un à l'autre en fonction des chapitres. Si ce découpage est assez logique, il n'est pourtant pas le plus approprié du fait de leur longueur, plus d'une soixantaine de pages chacune. Aussi, le lecteur doit naviguer d'un début d'intrigue à un autre en subissant à chaque fois une rupture brutale du récit. Au final le lecteur s'y perd, des éléments passe totalement à la trappes et d'autres se brouillent dans son esprit. L'intrigue devient flou et les personnages lui restent très distants. En effets, ces derniers, bien que travaillés sur le plan psychologique, sont froids, peu expressifs, et si l'on se raccroche aux trois héros, l'attachement que l'on cherche à leur porter n'est qu'illusoire. On les oublie aussi vite qu'ils reviennent dans le cours de l'histoire. Pourtant, on ne pourra nier l'originalité dont tous font preuve ! Combien de romans peuvent se vanter de mettre en scène un simple d'esprit comme personnage principal ? Assurément peu. Mais si l'histoire est plus ou moins claire dans les trois premières parties, la dernière va très vite et mélange le tout dans une fin d'intrigue unique complètement abracadabrante aboutissant à une sorte de délirium tremens littéraire. Conclusion ? Le lecteur termine sa lecture en ayant l'impression d'avoir été extérieur au récit, d'avoir complétement manquer quelque chose, à moins d'avoir finalement abandonnée en cours de route. Que retenir alors ? Une ambiance sombre et sous tension qui sait envelopper le lecteur, une intrigue brouillon qui aurait pu avoir potentiel, un univers bien construit et des références éparses des Chimères sans que le lecteur ne sache finalement la moindre chose sur elles, bien que l'on puisse aisément y trouver une allusion à tout ce qui est attrait aux mythes païens. On retiendra également le jeu de mot de l'auteur avec les noms de ces personnages clefs : Feïn et Thazi... FeïnThazi... Fantasy... Un genre pour lequel l'auteur n'est pas du tout fait ! Oui... La science fiction lui va bien mieux.
Bref, en grande amatrice de fantasy, je dois personnellement dire que Chimères m'aura laissé totalement de marbre. La plume est maîtrisée et mature, mais l'histoire reste sans grand intérêt, le potentiel qu'elle possédait ayant été ensevelit sous beaucoup de défauts. Un roman vite oublié pour ma part, mais qui pourra surement intéresser des lecteurs curieux de se faire leur propre avis ou des lecteurs aimant ce que j'aurais tendance à qualifier de "littérature expérimentale".