Genre : Heroic Fantasy Citation : « Pourquoi s'inclinent-ils devant moi ? demanda Sigarni d'un ton impérieux. Tous. Ils ne disent rien... mais ils s'inclinent. — C'est moi qui le leur ai ordonné, l'informa Asmidir. Tu dois t'habituer à être traitée de la sorte. Dorénavant, et ce jusqu'à la fin de ta vie, tu ne feras plus partie du commun des mortels. Tu vas devenir reine, Sigarni. » Présentation de l’histoire : Les Highlanders ont été écrasés par les armées ennemies. Depuis trop longtemps aliénés par le cruel Baron Gottasson, ils ont perdu toute fierté et toute confiance. Leur unique espoir repose sur Sigarni, une jeune fille farouche et obstinée. Descendante du plus puissant roi des Highlands, elle est la seule capable de mobiliser son peuple et de briser enfin le joug des tyrans. Il est temps pour Sigarni de faire face à son destin et de devenir la Reine des Batailles... |
♦ Critique par Arthur G.
David Gemmell est l'auteur que j'aurai suivi durant toute mon adolescence, un auteur que j'ai toujours adoré et admiré. Du coup, quand la responsable d'Histoires de Romans m'a demandé de m'occuper de ce livre, l'un des derniers publiés en France, et de sa suite, le Faucon Éternel, qui forme avec ce livre le cycle de la Reine Faucon, j'ai bien entendu accepté la proposition !
Le style de l'auteur reste aisément reconnaissable, avec d'efficaces changements de perspective pour mieux incarner l'ennemi quand il s'apprête à tomber dans un piège, ou des discussions philosophiques sur la futilité de la guerre annoncée, par exemple. La dynamique est bien équilibré entre phases descriptives et dialogues, le tout précédent des scènes de bataille bien orchestrées. Toutefois, il y manque le génie des Gemmell des grands jours. Et pour le coup, on peut dire que j'ai été très déçu ! En effet, le rythme reste mou, sans saveur et la dimension épique des chefs-d’œuvre de l'auteur n'y est pas correctement développée, les pactes d'alliance et serments d'allégeance semblant ridiculement empruntés, à la façon des romans de chevalerie de Chrétien de Troyes. Pour les conversations philosophiques auxquelles j'ai fait brièvement allusion plutôt : n'est-il pas un peu barbant de retomber sur les mêmes sujets, les mêmes arguments, posés aux mêmes moments de l'histoire, à CHAQUE œuvre de l'auteur ?! Et quand on a lu Waylander, sorti neuf ans plus tôt Outre-Manche, avec de subtils débats philosophiques et religieux, on ne peut que se sentir frustré avec les pâles argumentations de Reine des Batailles, tellement ces passages peuvent paraître niais.
L'histoire en elle-même constitue à la fois une pâle copie flagrante des succès de Gemmell et un précurseur. En effet, si Reine des Batailles est l'un des derniers sortis en France, il s'agit de l'un des premiers romans à être publiés en Grande-Bretagne en 1995. Et là où les fameux Waylander et Épée de l'Orage connurent leur heure de gloire, le cycle de la Reine Faucon tombe comme un cheveu dans la soupe. Or, de nombreux éléments de l'excellent Épée de l'Orage ou la trilogie Jon Shannow, tels que l'univers des Highlands pour le premier et la technologie magique des portails permettant de se déplacer instantanément à travers l'espace-temps pour le second, se retrouvent ici et constituent le cœur même de l'histoire. Mais ces ouvrages-là étaient, eux, bien rythmés, habités de personnages riches en couleurs accomplissant d'épiques prouesses. Du coup, le déjà vu gâche l'intensité de l'action qu'avait pu ressentir le lecteur dans les précédents ouvrages. Donc l'univers des Highlands : des montagnes dures mais verdoyantes, de fiers clans se disputant avec plus ou moins de force en permanence, un système monarchique inter-clans basé sur un sens de l'honneur fort et très peu tolérant envers les autre clans. On retrouve ici un mélange de références à la culture écossaise, divisée effectivement en Highland/Lowlands et d'emprunts au vocabulaire viking - avec les célèbres huskarls, notamment. Un paradoxe m'a titillé cependant, car il s'agit - comme pour l’Écosse réelle - d'une terre pauvre avec une relativement faible histoire militaire. Alors pourquoi sont-ils présentés comme de très redoutables guerriers, bien meilleurs en combat singulier que les Outlanders disposant d'une logistique et discipline militaire modernes, si dans l'histoire des clans il n'y a pas eu de roi ou seigneur de guerre unique depuis des siècles ? Concernant les personnages, l'héroïne est, pourrait-on dire, à la croisée des Temps, son action se déroulant sur plusieurs époques entremêlées en boucle temporelle... Mais dès lors le suspense est pour ainsi dire véritablement mauvais ! Car si elle échouait à une époque antérieure donnée tout son travail serait rendu impossible... Son futur valide son passé, résultat, aucune surprise, aucun intérêt au récit, on devine sur plusieurs dizaines de pages à l'avance ce qu'il adviendra de telle ou telle épreuve, parce que l'auteur n'a pas su dissimuler ces non-paradoxes temporels. Quant aux autres, je ne suis pas parvenu à m'attacher à un seul d'entre eux... Et pourtant, il y avait des possibilités entre le nain Ballistar, intelligent et sensible mais victime de son handicap physique, le Noir Asmidir exilé pour mieux former l’héroïne aux arts de la guerre ou encore Gwachlmai, le devin ivrogne... Tous auraient pu constituer des personnages principaux à eux seuls, mais le ton n'y est pas et du coup, leur sort importe tellement peu au lecteur.
Bref, une magnifique écriture, comme toujours, mais en dehors de ça une véritable une déception ! Un livre apparemment rédigé par un Gemmell qui n'était pas au top de sa forme que je ne recommanderais ni à ceux qui voudraient le découvrir, ni même à ceux qui seraient tentés d'explorer un peu plus son univers. On n'y apprend rien de plus ! Et surtout, il ternit l'image d'un auteur au rare talent, capable de faire des héros à partir d'individus incroyablement sombres et amoraux au premier regard.