Genre : Fantasy Citation : « Tout a commencé dans les bourrasques de l’hiver. Aussi bien ma naissance que notre rencontre, seize années plus tard. Pour moi, tu resteras toujours l’enfant dans la tempête. Celui que j’ai aimé dès le premier regard – même si, juste avant, je ne songeais qu’à l’égorger. » Présentation de l’histoire : Les Mages Bleus, servants de l’Équilibre, ont été décimés, mais l'un des leurs a survécu au prix de son honneur, motivé par le besoin impérieux de transmettre la vie. Le jeune Cerdric, né bréon de la noble famille Tirbald, va, quant à lui, affronter une mère qui ne l'a pas désiré, un monde qui semble incapable de l'aimer. Et si la solution à ses tourments résidait dans la Marche voisine, là où vit son mystérieux père, en exil ? Mais au terme de son voyage, Cerdric recevra surtout le poids d'un secret terriblement lourd à porter : celui de la Somme des Rêves, une espérance de renouveau pour ceux qui refusent de s'incliner devant les Dieux... |
♦ Critique par Julie V.
Figurez-vous des Caves, les Caves Alliées même, un bar sympathique à l'ambiance médiévale où de nombreux auteurs se sont réunis pour dédicacer leurs ouvrages. Parmi eux, un livre à la couverture bleue magnifique attire très vite l’œil, et c'est justement le roman que j'ai eu la chance de lire et de chroniquer grâce au partenariat d'Histoires de Romans avec les éditions Asgard que je remercie.
Si, au premier abord, la plume nous inspire celle de Robin Hobb ou d'autres grands noms de la fantasy comme Fritz Leiber ou encore Stephen R. Lawhead, il suffit juste de quelques chapitres pour voir le style de l'auteur déclarer son indépendance. Si l'histoire commence in medias res et n'est pas sans perdre le lecteur dans l'enchaînement des actions, l'écriture est belle et poétique, à la fois douce et frappante. Le rythme est bon, la dynamique fluide, la lecture facilitée, bref, l'attention est captivée. L'auteur n'est pas avare en scènes difficiles, mais loin d'aller dans la surenchère d'horreur, tout est au service de l'histoire et cette écriture très imagée fait la force de ce récit. La narration à la première personne rétrospective effraie un peu au début, mais la prise de recul est bien dosée, permettant de varier les points de vue et de ne pas trop se perdre dans le pathos. On suit par ailleurs quelque fois d'autres personnages, ce qui n'est pas sans participer au dynamisme de l’œuvre.
Notre lecture commence par une préface rédigée par Robin Hobb, largement connue pour ses œuvres comme L'Assassin Royal : c'est à double tranchant. Tout d'abord, on est enchanté de voir la maman de Fitz s'intéresser à la fantasy française, si malmenée dans son pays, et on entame la lecture à toute vitesse. Le point négatif, en revanche, c'est que tout l'univers Hobbien nous revient en tête et toute notre lecture est biaisée : on trouve un peu partout des similitudes dans les procédés utilisés par l'auteur et Nathalie Dau, comme l'alternance entre la narration à la première personne de Cerdric, des citations et des extraits de livres de l'univers du personnage qui nous renseignent sur les coutumes ou la religion du monde en question, le choix d'un récit rétrospectif empli d'une certaine nostalgie... Mais l'histoire éclate à la figure du lecteur ! Le début nous embarque très vite dans un univers bouleversé et torturé. Un nouveau vocabulaire, un autre monde avec ses propres lois se présentent immédiatement tandis que l'on assiste à un jugement et une condamnation difficile dès le prologue... le lecteur a de quoi se sentir un peu perdu. Mais les choses s'éclaircissent progressivement en même temps que le roman capte l'attention ; des extraits viennent éclairer notre compréhension, puis vient notre rencontre avec Cerdric que nous allons suivre tout au long de ce premier tome. L'intrigue est à la fois originale et cruelle, sur la persécution de la différence, la cupidité et la soif de pouvoir des hommes, ce qui n'est pas sans nous rappeler notre monde, mais la justesse du texte et des images nous le renvoie en pleine figure. Et au milieu de cette tempête douloureuse, il y a la Somme des rêves, un concentré d'amour qui offre des passages, parfois d'une surprenante naïveté, mais surtout d'une immense sérénité. Et c'est là où Nathalie Dau nous embarque complètement, dans ce noyau que nous cherchons à suivre au milieu d'un monde en ruine.
En somme, un livre fascinant qui nous captive complètement. Et si l'histoire peut rappeler les grands thèmes de la fantasy, l'écriture de Nathalie Dau s'émancipe et mêle avec génie mots et images pour nous envoyer cette bombe à retardement. Mon grand regret : réaliser que ce n'était que le premier tome... À quand la suite ?